En 1950, le passé et la durée se confondaient encore dans les pratiques industrielles. En dépit des innovations, les machines dépendaient toujours de l’ancestrale mécanique et de la motorisation séculaire. De cette apparente stabilité, l’imprimerie constituait un exemple. Certes, les techniques de fabrication des journaux et des livres avaient évolué, notamment depuis le siècle précédent. Des équipements motorisés remplaçaient la presse à bras des origines ; les rotatives offraient des capacités productives accélérées, sinon en qualité du moins en quantité, comparativement aux machines d’impression feuille à feuille ; la composition des textes s’était, elle aussi, mécanisée et le clavier suppléait la lente « levée » manuelle, un à un, des caractères ; la photogravure se substituait à l’artistique dessin buriné des illustrations ; la clicherie s’interposait entre les ateliers de composition et d’impression pour transformer, en plaques d’un seul tenant et à cadence rapide, les éléments hétérogènes destinés à l’impression. Mais, depuis cinq siècles, l’alliage d’imprimerie à base de plomb et la surface des reliefs du procédé typographique inventé par Gutenberg continuaient, selon des principes paraissant intangibles, à transmettre l’encre sur le papier de la majeure partie des publications. Nul ne pouvait imaginer, à l’époque, être au seuil de l’ère électronique qui, avant la fin du XXe siècle, ne laisserait rien subsister de ces techniques, submergées par l’automatisation et l’informatique. Alors, c’était quoi, la typographie ? Comment se pratiquaient ses métiers avant qu’ils ne disparaissent ?