Des Cap Corsins et des marchands maltais entre Marseille, l’Italie et les côtes de Barbarie ; des « Levantins » à Alep, à Smyrne et à Constantinople ; des chrétiens syriens entre le Liban, l’Égypte, la France et au-delà : des ecclésiastiques orientaux ; des intellectuels de la Nahda ; des fonctionnaires égyptiens ou ottomans « modernisateurs » : la palette de ces « hommes de l’entre-deux », du XVIe au début du XXe siècle, est large, et invite à considérer la frontière méditerranéenne, entre l’Europe chrétienne d’une part et l’Empire ottoman musulman de l’autre, comme un lieu de l’interactivité et de l’interrelation, plutôt que de l’opposition et de l’affrontement. La course et le commerce, les associations d’affaires et l’endettement, les cursus de formation « moderne », les travaux de traduction et de journalisme, l’exercice de charges administratives, la mise en oeuvre de projets de protection du patrimoine, sont autant de champs d’activité où s’élaborent très concrètement des « histoires croisées », des représentations et des modes d’action qui constituent la matière des identités respectives.