Les techniques textiles ont la spécificité de fabriquer des objets observables et bavards. Le fil conserve la trace de tous les gestes qui l’ont fabriqué, ennobli et mis en forme. Il est un témoin, souvent gardien des cultures, des époques et des territoires dans lesquels il a circulé. Il est également un porteur d’histoires qui se déplace à travers le temps et l’espace, engageant savoir-faire, expérimentations et récits. Son passage par de nombreux actes avant le dernier usage qui lui est connu nous ramène à son voyage : une itinérance à travers des mains, des lieux et des époques.
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Le temps dans lequel le savoir-faire et sa pratique se développent est intrinsèquement lié à l’endroit. À l’origine, le territoire est au cœur du travail de la matière textile. Les fibres, les teintures et les matériaux des outils en sont issus. On fabrique les objets avec les ressources trouvées sur place. Le lin, le chanvre, le coton, la ramie, les poils de mérinos, le cachemire, la vigogne ou encore la soie, pour ne citer que des fibres naturelles, ne proviennent pas des mêmes zones géographiques et engagent des savoir-faire et des méthodes de transformations différentes bien qu’apparentées.
Faire en sorte qu’un savoir-faire ne s’éteigne pas ou que sa compréhension ne se perde pas est un enjeu de la patrimonialisation conjointe des gestes et du savoir.