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Transformations soviétiques et mémoires en Asie centrale

De l’« indigénisation » à l’indépendance

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Depuis la fin de l’URSS, le monde s’est aisé­ment habi­tué à l’existence de quinze Etats dif­fé­rents se par­ta­geant l’espace ex-sovié­tique et il a consi­dé­ré comme acquis que l’Ouzbékistan soit le pays des Ouzbeks et le Kirghizstan celui des Kirghizes. Il a sem­blé éga­le­ment logique que l’éclatement de l’URSS soit dû lar­ge­ment à son ingé­rable diver­si­té, sur­tout quand y évo­luaient de nom­breuses popu­la­tions musul­manes dont on esti­mait qu’elles avaient été glo­ba­le­ment tenues en dehors des réseaux de pou­voir. Les déve­lop­pe­ments poli­tiques au sein de l’espace post-sovié­tique semblent aus­si aller dans ce sens, notam­ment depuis l’accession de V. Poutine au pou­voir en Russie en 1999 : seule la Russie accepte de lier son nom à l’héritage éta­tique sovié­tique, avec lequel les anciennes répu­bliques non russes se sont gran­de­ment dis­tan­cées depuis 1991.

À sa fon­da­tion, l’URSS a sys­té­ma­ti­sé le fait d’ériger cer­tains conglo­mé­rats eth­no-confes­sion­nels et lin­guis­tiques en « fait natio­nal ». On dési­gna ces iden­ti­tés eth­no­lin­guis­tiques et cultu­relles par les mots tra­duits en fran­çais par « natio­na­li­té », qui rend ce que nous appe­lons plu­tôt des eth­nies. Avec le vote de la sou­ve­rai­ne­té puis de l’indépendance par les par­le­ments des cinq RSS de la région, le « natio­nal » s’est ser­vi des ins­ti­tu­tions sovié­tiques pour modi­fier son iden­ti­té et en éli­mi­ner le sovié­tique. Il est donc néces­saire d’observer com­ment l’Empire, tsa­riste puis sovié­tique, a conçu les rela­tions du centre avec ses « indi­gènes » et les inter­re­la­tions, par­fois inat­ten­dues et sur­pre­nantes, qui se sont déve­lop­pées en un siècle.

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