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Guerres paysannes en Quercy

Violences, conciliations et répression pénale dans les campagnes du Lot (1810-1860)

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Dans la pre­mière moi­tié du XIXe siècle, tous les obser­va­teurs de la socié­té lotoise, confron­tés au spec­tacle des vio­lences aux­quelles se livrent les habi­tants de cette contrée, expriment un sen­ti­ment d’ef­froi et d’in­com­pré­hen­sion. La rixe, l’empoisonnement, l’in­cen­die cri­mi­nel, appa­raissent ici comme autant de modes sinon banals, du moins tolé­rés — voire, dans cer­tains cas, valo­ri­sés — de règle­ment du conflit. Mais c’est par-des­sus tout la fré­quence et la bru­ta­li­té des guerres inter-vil­la­geoises qui sus­citent l’é­ton­ne­ment des contem­po­rains : chaque été, les habi­tants de com­munes rivales s’en­gagent dans des cycles de défis et de ven­geances qui peuvent, par le jeu des alliances qui se nouent entre loca­li­tés voi­sines, embra­ser des can­tons entiers. Cette vio­lence, pour­tant, n’a rien de « sau­vage » ni d’a­nar­chique. Elle tra­duit une éthique spé­ci­fique – celle de l’hon­neur, com­po­sante fon­da­men­tale du sta­tut –, et doit être mise en rela­tion avec les formes d’or­ga­ni­sa­tion et les prin­cipes de fonc­tion­ne­ment de la socié­té rurale. Elle n’est pas non plus incon­trô­lée : bien des litiges s’a­chèvent, au terme d’une pro­cé­dure très éla­bo­rée de média­tion ou d’ar­bi­trage, soit par un « arran­ge­ment », soit par une récon­ci­lia­tion rituelle. Face à l’emprise crois­sante de la répres­sion pénale, la socié­té quer­cy­noise fait preuve d’une éton­nante capa­ci­té de résis­tance à l’ac­cul­tu­ra­tion : ain­si n’est-il pas rare qu’au terme d’un véri­table para­si­tage du pro­cès, la vio­lence de la répres­sion judi­ciaire soit détour­née de sa fonc­tion pre­mière pour être inté­grée au jeu des ven­geances pri­vées. C’est cette his­toire mou­ve­men­tée qu’ex­plore ici l’au­teur, à par­tir des archives judiciaires. 

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