Partout où les Chinois ont émigré en grand nombre, ils ont fondé des écoles pour instruire leurs enfants. À Singapour, la présence d’écoles chinoises est attestée dans les années qui suivent l’installation des Anglais. Ces écoles s’organisent librement. Elles gèrent leurs ressources financières, fixent les programmes, recrutent les enseignants. Mais en 1920, le gouvernement colonial anglais met fin à plus d’un siècle d’autonomie. L’immatriculation obligatoire des écoles et des enseignants participe d’un ensemble de mesures renforçant le contrôle politique et idéologique des Anglais sur la population chinoise, dont la loyauté est convoitée depuis la Chine par Sun Yat-Sen et le Komintern. Le développement des établissements scolaires fondés par les Chinois répond à des besoins spécifiques, notamment liés au processus migratoire, à la formation de sociétés d’immigrants, à des stratégies individuelles et collectives. La singularité de l’histoire des immigrés chinois durant la période coloniale est ici mise en rapport avec l’intérêt pour l’éducation manifesté par les Chinois. Cet ouvrage ne se présente donc pas comme une étude des écoles chinoises considérées seulement comme établissements d’enseignement. Il s’agit surtout de cerner la place de ces établissements au sein de la colonie chinoise de Singapour pendant le premier siècle de son existence.